" L' Art est une visite du temps " Ariane Angeloglou

La villa Douillet à Grenoble et son hôpital bénévole durant la première guerre mondiale

      Plaque inaugurée le 9 Mars au 34 Rue Thiers.

À l’occasion de la commémoration du 9 mars 2020, il m’a été demandé de présenter l’histoire des lieux. Voici un extrait de cette présentation.

Né en 1857, L.A. Douillet est le fils de Elisa Perrin et de Joseph Douillet. Il est le petit-fils de Anne-Marie Perrin née Nicolet, veuve d’Auguste Perrin qui fonde en 1860 une entreprise de ganterie. Ses fils Férréol et Paul, puis Valérien, chargé de la partie commerciale, la rejoignent dans cette entreprise, suivis quelques années plus tard par Louis - Alphonse Douillet, leur neveu.

En ce dernier tiers du XIXe siècle, la ganterie grenobloise, artisanat de luxe réputé, passe au stade industriel grâce à l’invention par Xavier Jouvin de gabarits et de matrices emporte-pièce, les « mains de fer ».

En 1873, Valérien part pour les États-Unis et y ouvre des comptoirs qui deviendront des filiales.  Dès 1885, L.A. Douillet s’y installe et y restera 17 ans ; dirigeant des maisons récemment fondées par Valérien. En 1887 il s’associe avec la Société Perrin frères et en 1908 devient le seul associé de Valérien Perrin. Au début du XXe siècle, cette société comporte 98 succursales en France et dans plusieurs capitales. L’entreprise fonde Valisère en 1913.

 En 1898, il épouse Anne Marie Mounier. Ils auront 8 enfants. En 1900, ils envisagent de revenir s’installer à Grenoble et font l’acquisition d’une villa à l’angle de la rue des Bains et de l’avenue Thiers.

En 1900 L.A Douillet achète la « Villa Demenjon ».

Construite en 1893 par Emile Demenjon, cette demeure est située dans le secteur d’urbanisation nouvelle qui se développe à l’ouest de la ville à la fin du XIXe, au sud du Cours Berriat. Elle est construite à proximité de celle de l’école et du centre de soins fondé par les sœurs de Notre-Dame de la Croix de Murinais qui deviendra la Clinique des Bains.

De la villa d’origine, devenue aujourd’hui le Restaurant Madam, on distingue encore sur la façade principale, trois travées régulières de baies à encadrement polychrome. Leurs jambages sont faits d’une alternance de rangs de briques et de blocs de ciment moulé, « la pierre artificielle ».

La haute toiture est couverte en ardoise et percée d’une lucarne centrale à fronton et de deux lucarnes cintrées. Au Sud un oriel, avancée en encorbellement, est animé d’un jeu de couleurs où des briques polychromes et des éléments en ciment moulé dessinent un réseau de losanges. Des photos et archives conservées par la famille Douillet montrent que c’est en 1895 que Mr Demenjon fait réaliser par les architectes Demartigny et Cutavoz une élégante marquise qui couvre la terrasse longeant la façade principale.

C’est à distance, que à partir de 1900, L. A. Douillet commande aux architectes Chatrousse et Ricoud des travaux d’embellissement intérieur de la villa : décoration et mise en peinture de plafonds et boiseries, mais surtout pose de cinq vitraux dans le fumoir. Quatre médaillons ornés de bustes d’indiens et deux indiens en pied .

La famille s’installe en 1902 et L.A. Douillet entreprend une extension côté Nord par l’adjonction d’un corps de bâtiment en pierre. L’architecte est Paul Perrin, un parent éloigné.  Avec une avancée à pans coupés vitrée au rez-de-chaussée, la surface du grand salon existant est doublée, avec à l’arrière, une salle à manger pour les enfants.

Au premier étage de l’extension, une vaste salle de billard ouvrant sur une belle terrasse. Il existe deux portraits réalisés par le peintre François Guiguet qui représentent Louis-Alphonse et Anne-Marie Douillet assis dans cette pièce dont le décor est composé notamment d’objets d’art d’origine asiatique et de tableaux d’artistes dauphinois tels que l’Abbé Calès. Dans le sous-sol est créée une chapelle. Des vitraux réalisés par un maître verrier parisien, Jac. Galland, représentent les saints patrons des membres de la famille. La façade est ornée d’élégantes ferronneries aux étages et de décors en pierre de taille tels que des épis de maïs qui ornent les chaînages d’angle. 

Sont construits également un garage et une orangerie aujourd’hui disparus, ainsi qu’une porterie avec grille et un portail de style art nouveau toujours en place.

Mais la grande originalité de cette demeure réside dans la construction d’un bowling privé . Il accueillera l'ancien hôpital bénévole n° 55 bis, appellé " Ambulance Douillet " durant la Première guerre mondiale. Monsieur et Madame Douillet recevront l’un et l’autre la médaille d’Argent de la Reconnaissance française.

La vente du Bowling et de la villa.

Le bowling est vendu quelques années après la mort en 1924 de L.A. Douillet à la clinique des Bains qui souhaite s’agrandir. La villa est acquise par clinique en 1937 et deviendra une école d’infirmière puis des bureaux. À cette époque, le bowling sera déposé en partie et servira de salle de réunion, et de salle de fête jusque vers 1960.  Semi-abandonné jusqu’en 2006 lors du déménagement de la clinique. Il est déconstruit en 2010 lorsqu’un promoteur rachète les lieux.

Cette page a utilisé l'ouvrage de Dominique Chancel: « Une villa de la belle époque à Grenoble, à l'ombre de la clinique des Bains – La villa Demenjon-Douillet et son bowling privé orné de paysages d'Edouard Brun ».

Il est le fruit d'un long travail de recherche effectué dans divers fonds d’archives (dont celui de la famille Douillet aimablement mis à disposition par Jacques Douillet). Dominique Chancel est Architecte honoraire et Historien du patrimoine, ancien chargé d'inventaire du patrimoine au sein du Service du Patrimoine culturel de l'Isère. Cet ouvrage édité en 2012 par Patrimoine et Développement du Grand Grenoble, est aujourd’hui une des mémoires de ce lieu. Parmi les illustrations, il convient de  souligner l'intérêt de plusieurs photomontages réalisés par l'auteur dont celui repris en haut de cette page montrant la façade avec la belle marquise .

 

 

 

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